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Publié le 23 janvier 2020

9 février 2020 – le quota n’est pas la solution

Le 9 février, nous serons appelés à voter sur l’initiative visant à augmenter le nombre de logements abordables sur la base de la règle des quotas. En cas d'entrée en vigueur, cette initiative, qui fait fi des spécificités régionales, aura des conséquences coûteuses et déstabilisera le marché du logement.

Le 9 février prochain, les citoyens suisses se prononceront sur l’initiative populaire intitulée « Davantage de logements abordables ». À travers ce texte, les auteurs de l’initiative soulignent le manque de logements à loyer modéré du pays. Afin de remédier à cette situation, les initiants demandent qu’un minimum de 10% des nouveaux logements soient construits par des coopératives d’habitation. De plus, un droit de préemption au bénéfice de la collectivité sur tous les bien-fonds pourrait être introduit. Enfin, l’initiative a également pour but d’éviter que les subventions soutenant les assainissements énergétiques soient dédiées à des projets immobiliers dits luxueux.

Le Conseil fédéral et les Chambres fédérales recommandent de rejeter cette initiative. Un contre-projet qui s’appliquerait uniquement en cas de rejet de l’initiative est prévu. Il a pour objectif d’accroître la dotation du fonds de roulement pour mieux servir la construction de logements d’utilité publique par un versement de 250 millions supplémentaires.

Afin de connaître la position des principaux acteurs concernés, soit les coopératives, TocToc est parti à la rencontre de Monsieur Roland Schaub, Président de COOPELIA, une coopérative active en Suisse romande en faveur de la construction de logements individuels et associatifs d’utilité publique.

Monsieur Schaub, vous êtes Président de COOPELIA. Dans quelle mesure la situation dépeinte dans le texte de l’initiative, soit une pénurie de logements à loyer modéré, est-elle conforme à celle du marché ?

 

Elle l’est dans certaines régions, mais pas dans d’autres. Les initiants souhaitent faire adopter un quota de 10% dans toutes les régions, sans considérer le marché local. Cela peut se justifier dans les grandes villes, telles que Lausanne, Genève, ou encore Zurich. Celles-ci manquent d’appartements à loyer modéré. En revanche, ce n’est pas le cas en campagne ou dans l’arrière-pays. Dans ces régions, le prix du foncier est en général plus abordable. D’ailleurs, certains de ces logements à loyer modéré peinent même à trouver des locataires. En résumé, cette initiative ne tient ni compte de la demande, ni des réalités locales, ou encore de la conjoncture.

Si cette initiative venait à passer, le marché du logement en serait impacté. Il souffrirait d’un déséquilibre et cela serait contre-productif. On peut aisément concéder que l’augmentation de logements à loyer modéré est nécessaire dans certaines régions, sans qu’il n’y ait besoin de le formaliser à travers l’instauration d’un quota. Si nécessaire, afin d’être plus en phase avec les réalités locales, la décision de prendre en charge des mesures correctrices ciblées devrait être mise en œuvre par les cantons ou les communes.

 

 

Quelles sont les risques de soumettre la construction de logements à la règle d’un quota ?

 

Les risques résident essentiellement dans un dérèglement du marché, ainsi que la création de frais supplémentaires, dus à la mise en place de postes de travail visant à assurer le contrôle du quota du 10%.

 

Identifiez-vous d’autres limites à cette initiative populaire ? Si oui, lesquelles ?

 

L’introduction d’un droit de préemption en faveur des cantons et des communes sur les terrains bâtis et non bâtis n’est pas acceptable. Elle est contraire au droit à la propriété et à la liberté contractuelle. Sauf erreur, le canton de Genève a déjà le droit de préemption. Cette initiative constitue une atteinte à la liberté des propriétaires, une forme d’ingérence de la part des pouvoirs publics, bien qu’un droit de préemption ne soit pas un droit d’emption, mais un droit préférentiel. En d’autres termes, l’Etat pourrait acheter des terrains s’il s’aligne à ce qui est offert. L’Etat aurait la possibilité d’acheter un droit d’emption. Les prix du foncier ne vont pas baisser pour autant. Le propriétaire qui veut vendre son bien le fera toujours au plus offrant. En cas d’entrée en vigueur de cette initiative, les prix du foncier ne vont pas baisser pour autant, s’agissant d’un droit préférentiel.